Nahia Zubeldia dans le silence de la mer

Nahia Zubeldia participe à la dizième résidence d’écrivains basques. Rencontre au sein de la ferme Nekatoenea à Hendaye.

Publié le 10-12-2020

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Il faut longer le verger de pommes anciennes du domaine d'Abbadia, laisser le chemin d'herbe qui plonge droit vers la falaise et la mer pour finalement atteindre la ferme Nekatoenea. Sur le perron, Nahia Zubeldia a déjà pris possession des lieux, dans le silence foisonnant de cette campagne intacte rythmée par le fracas sourd des vagues. Tout est déjà musique et Nahia tient désormais sa partition. « Je ne suis pas écrivain » s'excuse-t-elle, comme un préambule à cette résidence d'artiste destinée aux écrivains basques. Mais si elle a été sélectionnée par l'Institut culturel basque, le CPIE Littoral basque et la Fédération des écrivains basques, c'est que la chanteuse et traductrice dans le civil, aime le jeu des mots. Et leurs charges musicales. De la chanson au poème, il y a une évidence. À l'inverse, « un poème, c'est toujours une chanson possible » dit-elle.

Pour ce petit mois de résidence au pied du château d'Abbadia, Nahia écrit en musique, des poèmes formels d'abord, avec le bon nombre de pieds qui s'accrochent au tempo. Cela évite de compter avec les doigts, quand on n'est pas comptable et de saisir la musique des mots jusqu'à ce que l'harmonie les emporte et que le poème s'affranchisse de sa structure et trouve son propre rythme. Une façon pour la Cibourienne d'accompagner le flux inégal de la houle qui devient clapot, de vider son sac et son ressac et de remonter l'odyssée d'un fameux marin basque et ses errances au creux ou au sommet de la vague.

Pour la dixième édition de cette résidence d'artiste, la fondation Elkano 500 Fundazioa de Getaria s'est associée au projet pour commémorer les 500 ans du premier tour du monde que le marin basque Sebastien Elkano, parti avec Magellan, a fini par boucler. Elkano symbolise l'ouverture, la mer prometteuse. En contrepoint, et puisqu'on le convoque, il n'en reviendrait pas que « l'on meure encore en mer » assure Nahia Zubeldia. Le poème hoquète dans le sillage des migrants, dans les gestes d'un pêcheur ou dans les courants qui portent une méduse et des sacs plastiques. À mi-parcours, Nahia est immergée dans une mer agitée, depuis sa ferme-phare qui est, consent-elle, « le meilleur lieu pour écrire sur la mer ». Téléphone coupé, cernée d'images, de livres et de dictionnaires, la chanteuse d'Unama et de Lumi délaisse la personnification ou l'hommage pour remettre Elkano à flot et le laisser barboter dans les courants d'aujourd'hui. Des images naissent au gré des tempêtes, des personnages s'entrechoquent, des mots s'inventent au creux des vagues, malmènent avec gourmandise la langue, l'euskara, que Nahia juge parfois trop sage. Elle n'est plus portée par les haleurs mais son bateau d’Hendayevre doit rentrer au port pour orchestrer tout ce sens. Peut-être en musique, justement. Nahia ne se sent pas de déclamer des poèmes mais conserve l'idée de la possibilité d'une chanson.

Plus d’infos sur le site de l’Institut Culturel Basque ou sur celui du CPIE Littoral basque.

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