Épisode 4 – Quand le troisième âge se vit en partage

L’association Gurekin développe des habitats inclusifs pour seniors au Pays Basque. Une solution pour briser l'isolement des personnes âgées et les maintenir en activité. Les colocataires de la première maison ouverte à Urt nous racontent leur nouvelle vie.

Mise à jour : 3 juillet 2025

Vieillir seuls, très peu pour eux ! A 78 et 82 ans, Jipé et Vivou, comme ils se surnomment, ont choisi de vivre en collectivité. Il y a six mois, ils ont quitté leur ancienne habitation pour emménager ici, à Urt, dans la première maison partagée pour seniors du Pays Basque.

Une alternative à l’EHPAD

C’est Annabelle Pachon Trouche, une ancienne animatrice au Centre Social Maria Pia de Biarritz, qui est à l’origine du projet. En 2018, elle crée l’association Gurekin avec l’idée de bâtir des habitats où les personnes âgées puissent vivre ensemble tout en gardant leur indépendance. « Ce n’est pas un EHPAD. Les habitants sont tous autonomes ou semi autonomes, précise son président, Xabi Landart. Mais on ne vient pas non plus simplement pour disposer d’un logement. » Le « vivre-ensemble » est à la base de la démarche de Gurekin. Les futurs occupants sont impliqués dès la genèse du projet pour créer « des maisons qui leur ressemblent et où ils se sentent chez eux », explique Xabi Landart. Pendant plus de deux ans, les participants à l’expérimentation ont ainsi pu réfléchir à leur lieu de vie idéal, concevoir l’aménagement de leurs appartements et écrire les règles de vie communes qu’ils ont consignées dans un épais carnet, leur « Projet de Vie Sociale et Partagée ». « Ça nous a permis d’apprendre à nous connaître et nous mettre d’accord sur la façon dont on voulait cohabiter », raconte Vivou.

Une nouvelle famille

A la villa Jeanne, chaque pensionnaire dispose de son propre appartement. Des T2 modernes et fonctionnels où ils peuvent vivre de façon indépendante. Le quotidien se fait dans le respect du rythme de chacun. Pas d’horaires imposés, les locataires sont libres d’aller et venir à leur guise. « En général, on se retrouve le matin pour boire le café, raconte Jipé, en montrant la grande pièce à vivre où ils peuvent cuisiner ensemble, laver leur linge, regarder la télé ou simplement discuter. On se raconte nos vies, on parle de tout. » Pour Vivou, qui habitait seule dans une maison à Biarritz après le décès de son mari, c’est un changement de décor radical. « Là-bas, je n’avais personne sur qui compter. Ici, je me sens bien et en sécurité. » Avec les neuf autres colocataires, elle a recréé une petite famille, « sa cousinade », comme elle l’appelle. Jipé abonde : « On fait tous attention les uns aux autres, on s’entraide beaucoup ! »

Encourager le bien vieillir

Avec l'aide des trois salariés de l’association présents sur place, les résidents composent chaque semaine le planning des activités avec deux ateliers participatifs par mois qui réunit les 10 séniors. « Nous les sollicitons au maximum pour qu’ils restent autonomes le plus longtemps possible et qu’ils vieillissent dignement », explique Xabi Landart. Atelier cuisine, sortie au marché, vide-greniers, potager... les idées ne manquent pas. « La semaine dernière, on a invité tous les habitants du quartier à une journée jeux. C’était génial ! On a pu apprendre à mieux se connaître », rapporte Jipé. Aux visiteurs curieux, il est toujours ravi d’ouvrir les portes de leur « maison témoin ». Pour rien au monde, il ne changerait de vie. « C’est ‘the place to be’ ici, c’est encore mieux que ce qu’on avait imaginé ! » Grâce au concours du bailleur social le COL, « qui a tout de suite cru à notre idée », tient à souligner Xabi Landart, les prix des locations restent très abordables, entre 550 et 1140 euros par mois selon les revenus des bénéficiaires. C’est trois fois moins cher qu’en maison de retraite, même si les frais courants (alimentation, soins) ne sont pas inclus.

Deux autres maisons partagées verront le jour à Hasparren fin 2026 et Urcuit début 2027. Preuve que le concept séduit, « aujourd’hui, ce sont les communes qui viennent à nous pour monter des projets », se réjouit Xabi Landart. Pour pouvoir se porter candidat, les personnes intéressées doivent être autonomes et âgées d’au moins 65 ans. Des places sont encore disponibles.

Voir le site de l’association Gurekin

Senior/étudiant : une colocation gagnant-gagnant

Pour aider les étudiants à trouver un logement au Pays Basque, l’Office 64 de l’Habitat a imaginé une formule originale : habiter avec un senior ! Le principe est simple : à ses locataires de plus de 60 ans qui disposent d’une chambre libre chez eux, le bailleur propose de la sous-louer à un étudiant ou à un saisonnier de moins de 30 ans, en contrepartie d’un loyer modéré (entre 100 et 160 euros par mois). L’Office 64 de l’Habitat s’occupe du contrat de location et aide l’accueillant à trouver le colocataire qui lui correspond. L’hébergement se fait à la carte, sur une année scolaire complète ou des périodes plus courtes. Pour Etienne, qui accueille Medhi pendant l’été, c’est d’abord « un geste de solidarité envers la jeunesse » mais aussi un moyen pour lui de briser la solitude et ne pas rester « le vieil homme dans sa caverne », comme il le dit en souriant. Grâce à ce système, le jeune étudiant en informatique pourra lui rester travailler au Pays Basque en pleine saison estivale, une période où il est particulièrement difficile de se loger. Lancé en 2023, le dispositif a déjà permis 16 co-hébergements soit 1300 nuitées. Le bailleur lance un appel aux entreprises locales pour trouver de nouveaux candidats. 

Plus d’informations sur le site Interne de l’Office 64  ou par mail à co-hebergement@office64.fr